L’éclairage de scène : l’art invisible qui donne vie au spectacle

Lorsque l’on se rend à un spectacle qu’il s’agisse d’une pièce de théâtre, d’un concert ou d’un ballet, la sensibilité des organes de la « perception » est sollicitée sous plusieurs espèces. Les performances des artistes d’un côté captent notre attention, mais également l’ambiance créée par l’éclairage de scène, qui, bien que beaucoup plus discret, n’est pas moins capital. C’est cet art de la lumière qui donne aux émotions leur éclat, aux mouvements leur présence, et qui propulse les spectateurs vers une sorte de monde parallèle. Mais quel chemin historique cet incontournable dispositif du spectacle vivant a-t-il parcouru pour devenir l’élément central qu’il est aujourd’hui ?

Une brève histoire de l’éclairage de scène

L’éclairage de scène a un long chemin à parcourir depuis les torchères à l’amphithéâtre, où la lumière ne provenait que de l’extérieur lors des représentations (la lumière du jour) ou de flammes (ovales, torches, chandeliers). Le besoin d’une illumination artificielle donnait alors tout son sens au théâtre couvert de la Renaissance qui permettait d’utiliser d’autres sources lumineuses. Celles-ci étaient d’abord de simples chandelles, puis les lampes à huile, qui rendirent l’éclairagiste « maître de la lumière », en toute lumière… mais encore soumise à la lumière du jour extérieur.

Au XIXe siècle, la révolution fut apportée par le gaz d’éclairage, qui non seulement éclairait mieux que dans les théâtres antérieurs, mais dont la possibilité de variation de l’intensité lumineuse modifiait la politique de la lumière dans ses effets et l’intensité. La matérialité même du système de son et de lumière a été bouleversée avec l’électricité, à mesure que les nouvelles technologies ont progressivement supplanté les anciennes (les fameuses scénographies étoilées, par exemple, n’éclairaient que par une lumière fournie par des lampes à huile, puis à pétrole). Les projecteurs électriques, plus puissants et plus sûrs que leurs homologues à gaz, ont permis aux concepteurs lumière de véritablement « peindre » avec la lumière, en ajoutant à la lumière blanche des colorants et des filtres neufs.

Les principes fondamentaux de l’éclairage scénique

Il ne s’agit pas seulement d’éclairer les artistes, l’éclairage est considérée comme une forme d’art qui implique de maîtriser les interactions de la lumière avec les interprètes, le décor, le public et bien d’autres éléments. Pour n’en retenir ici que quelques-uns :

L’intensité

Le contrôle de la lumière donne la possibilité de capter l’attention du public. Une montée de la lumière peut créer une tension, mais cela peut également être un moyen d’installer la confidence voire le secret, une descente le noir feutré du mystérieux. De nos jours, grâce aux gradateurs, il est possible de moduler la lumière de très façon précise, dans un nombre très important de nuances.

La couleur

La couleur éclaire l’émotion. Les tonalités chaudes comme le rouge et l’orange peuvent évoquer le désir ou la colère alors que le bleu et le vert traduisent la sérénité ou la peur. Les filtres de couleur, les LED RGB d’aujourd’hui permettent de moduler la couleur et, par ricochet, l’ambiance existentielle de la scène, de ses personnages, en quelques instants.

La direction et l’angle

Il n’est pas une forme qui échappe à l’angle de la lumière qui la constitue. L’éclairage frontal déterminera le visage en lumière aveuglante, mais peu en volume alors que l’éclairage d’un profil redessine les formes, leur conférant du dynamisme dans le reflet de reliefs et angles (ex. un contre-jour).

Le mouvement

Le mouvement dans le champ de la lumière a pris toute son importance grâce aux nouvelles technologies. Les projecteurs qui se déplacent par eux-mêmes de à eux-mêmes tout en modifiant leur angle ou la forme de leur faisceau, comme les lyres, sont des outils dont on ne pourrait se passer aujourd’hui.

Le rôle du concepteur lumière

Derrière chaque spectacle mémorable, un concepteur lumière talentueux. Ce professionnel commande d’étudié le scénario, la scénographie et les autres concepteurs qui constituent avec lui une équipe de création rendant possible, dès le premier filage, la présence d’un même espace. Cela s’organise bien avant la première répétition, en analysant le scénario, en interrogeant les intentions artistiques et en conceptualisant les atmosphères.

Le concepteur lumière est un technicien de l’éclairage de scène, un artiste sensible aux manières d’interagir avec les maquillages, costumes et décors et aux relations à porter aux transitions qui rythment l’action.

Les technologies de l’éclairage

L’ère numérique a introduit d’importants changements seraient dans la conception et la mise en œuvre des effets d’éclairage de scène. En termes d’ergonomie, de préprogrammation, l’informatique a bouleversé la qualité des informations ŗ visualiser en temps réel, apportant de nouvelles modalités de synchronsation des enchaînements. Le pilotage des mouvements ne doit plus s’effectuer en fonction des installations ayant une visée artistique, mais à l’échelle du spectacle totalement envisagé.

Les LEDs

Les LEDs ont fait progresser l’éclairage au-delà de ses frontières, déplaçant des normes et permettant une meilleure qualité de restitution lumineuse, une durée de vie augmentée, une réduction du coût d’exploitation, des transformations en matière de couleurs, de température, de puissance, la capacité de mélange des couleurs. En effet, les projecteurs LED n’ont pas besoin de filtre, générant un spectre radioélectrique plus étendu et émettant peu de chaleur, idéal dans un espace clos.

Les projecteurs intelligents

Les projecteurs automatisés tout en un (lyres LED) peuvent opter pour le changement des couleurs et des gobos, du mouvement-amplitude et rapport de force des mouvements, ainsi que du zoom et focus variables simplifient la tâche des concepteurs en réduisant les réglementations d’éclairage.

La réalité augmentée et les projections vidéo

L’intégration de la vidéo dans l’éclairage de scène est devenu une opération d’infrastructure scénique et forumétique permettant d’ouvrir de nouveaux horizons vers lesquels on peut rassembler un monde animé. Les projections validant les décors et pouvant modifier son espace et ses interprètes, apportent des solutions d’illusionnisme et d’animation. Associées à des capteurs de mouvement, au sens le plus significatif, la lumière d’accompagner le corps du spectacle.

L’éclairage de scène : bien plus qu’un outil technique, une émotion

Si la technologie propose des outils de plus en plus performants, l’éclairage de scène se doit d’être au service de l’histoire et de l’émotion à délivrer. La lumière constitue un véritable langage, universel, hors des mots, apte à donner une atmosphère, à indiquer une durée, à traduire un état d’âme.

À titre d’illustration, dans une scène de théâtre, lorsque le personnage éprouve un conflit intérieur, l’éclairage en contraste en zone d’ombre et d’ombre peut l’illustrer. Dans le cas d’un concert, un faisceau lumineux qui suit l’artiste va favoriser la connexion entre l’artiste et le public, tandis qu’un effet lumineux synchronisé avec un solo de guitare va intensifier l’énergie du moment.

Les enjeux contemporains et à venir de l’éclairage de scène

L’éclairage de scène est de nos jours confronté à de nouveaux enjeux. La prise de conscience écologique incite les professionnels à s’orienter vers des solutions plus durables : l’utilisation de LEDs moins consommateurs d’énergie en fait partie. De surcroît, la pluralité des plateformes (diffusions en ligne, réalité virtuelle) requiert un changement constant des techniques d’éclairage.

La formation des nouvelles générations de concepteurs lumières prend son rôle. Conciliant maîtrise technologique et sens artistique, elle demande à être étayée. Les écoles spécialisées et les ateliers professionnels en sont les principaux vecteurs.

Conclusion

L’éclairage de scène n’est pas seulement un outil technique, c’est bien un art au sens propre du terme : il réunit en effet des compétences technique, artistique, et humaine. Invisible mais bien présent, la lumière est ce qui constitue notre regard sur le spectacle, ce qu’il véhicule d’émotions, comme ce qu’il raconte d’histoires.

A l’aube du prochain spectacle que nous aurons à voir, prenons le temps d’apprécier ce rapport de forces en présence de lumières si nuancé qui, sans un mot, nous oriente, nous émeut et nous fait vibrer. Car derrière chaque projecteur, il y a une intention, une vision, un artiste de l’ombre qui fait vivre la scène.